Tendance

Tendance

Le succès des néo chaussures de randonnée

Cette année, les « hiking boots » fleurissent sur les podiums comme dans la rue !  Alors pour que les citadins puissent gambader confortablement et avec style, les marques de rando techniques renouvellent leurs modèles historiques. Zoom sur quelques-unes de ces maisons françaises.

Par Ophélie Francq

Agrémentées de lacets colorés pour Prada, noires signés Miu Miu et Moncler, version montante en toile chez Céline ou encore 100% coton pour Jacquemus (dont la collection se nommait carrément « La Montagne »); les chaussures de randonnée sont descendues des  sommets montagneux aux pavés urbains.

Au grand bonheur des marques techniques. North Face collabore désormais avec Gucci et dans la rue, les influenceuses chaussent du Pataugas et du Téva en toute décontraction.

Même Arthur, un jeune trentenaire Corse, a fini par craquer : «  J’ai acheté une paire de Salomon il y a 4 ans pour randonner, depuis quelques mois je les mets aussi à Paris pour aller travailler.  Avant j’avais l’impression que ça faisait trop grosse chaussure mais inconsciemment la tendance a dû avoir ma peau ! »

La tendance des « hiking boots” n’est pourtant pas nouvelle. En 2009, le Canadien Arcteryx lançait sa gamme Veilance, à savoir des vêtements de rando technique dans un design plus citadin. En 2017, le New York Times avait même mis un mot sur le phénomène : le gorpcore ! Gorp est l’acronyme de « good, oats, raisins, peanuts » (le mélange énergétique favoris des randonneurs) et core celui de hardcore.

Un style qui sacralise l’attitude sportive et puise son «ADN» dans la panoplie des guides de haute montagne : polaires, pantalons, parkas imperméables et chaussures de marche, le tout griffé labels techniques (Patagonia, North Face, Columbia, Quechua…).

Si 2021 a relancé l’essor des chaussures de randonnée, peut-être est ce dû (encore une fois) à cette drôle de période. Les confinements successifs ont provoqué un besoin de nature et de confort.

Et pour cela, quoi de mieux que la chaussure de randonnée comme symbole de liberté ?

Selon la marque Paraboot, maison née en 1905 et historiquement liée à la chaussure technique de montagne et d’escalade, la tendance s’inscrit dans un phénomène plus large : « Le discours éco responsable est au centre de la mode aujourd’hui. Les gens recherchent de plus en plus l’authenticité et la durabilité dans les produits. Or ce type de chaussure est fait pour résister au fil du temps. »

Une tendance qui tombe à pic :  Nous devons faire face à la montée du marché des sneakers », souligne Paraboot. Depuis 2 ans, les ventes de leurs modèles iconiques, -les Avorias et les Yosemite- grimpent et les demandes de collaborations fusent ! « Car notre histoire nous rend légitime sur le marché. » 

Des paires conçues dans les années 70 à un moment où la marque profite de l’essor du loisir pour confectionner de véritables chaussures de montagne (randonnée, ski, après ski..).

Cette année, c’est le modèle Yosemite –  initialement conçu pour la varappe – qui a été revisité pour une collab avec le label Walk in Paris; dans une version « Dream of Yosemite », proposée en vert sapin velours, équipée de lacets jaunes et conçue avec des bandes d’enrobage caoutchouc à l’avant et à l’arrière de la chaussure. « On l’a stylisé et allégé pour les trottoirs parisiens car à l’origine le modèle n’est pas fait pour marcher. Mais la paire reste robuste ! »

La plupart des chaussures de la marque sont faites main en Isère avec l’utilisation du cousu norvégien. Une technique peu utilisée, car complexe et chronophage :  « Mais qui permet un montage solide et souple à la fois. Elle rend aussi la chaussure imperméable et rend possible le ressemelage…»

Revisiter des chaussures techniques pour les citadins, c’est également le pari de la marque française Le Soulor, née en 1925. Initialement, cette maison béarnaise fabrique des chaussures de travail pour les bergers : « Robustes mais qui font mal aux pieds », s’amuse  Philippe, béret vissé sur la tête.

Cet amoureux de la région a repris l’entreprise il y 5 ans. Depuis, le concept a évolué : «  On demande simplement à chaque client : «  Qu’allez vous faire de vos chaussures ? ». En fonction de s’il veut élever des brebis, aller se balader pour cueillir les champignons ou faire du vélo sur les quais de Seine, on choisira l’épaisseur du cuir, des contreforts ainsi que le type de semelle… Les chaussures seront ainsi plus ou moins souples et fines », explique le béarnais.

Le client peut ensuite choisir la couleur de la paire avant de la recevoir deux à trois mois plus tard. Une démarche responsable pour éviter le surplus ! Chaque paire est également conçue à la main (avec cette même technique norvégienne). « On a réquisitionné des artisans chez les compagnons du devoir ou chez de grandes marques comme celle dont le nom commence par un grand H. Des gens très doués mis en binôme avec des plus anciens. La transmission du savoir est essentielle.”

Chez Le Soulor, la vente de chaussures souples est désormais équivalente à celle des plus rigides : « Logique car le marché des bergers / bûcherons / charpentiers est non extensible contrairement à celui des urbains. “ Déjà distribué par des magasins comme le Vieux Campeur, Le Soulor vient d’ouvrir sa première boutique parisienne au cœur du Marais !  Mais les bergers ne seront jamais oubliés, Philippe le promet.